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A Madness of Angels, de Kate Griffin

dimanche 27 décembre 2009


Pas de traduction française.

Deux ans après son décès brutal, Matthew Swift se réveille dans son lit, dans la capitale britannique. La dernière fois qu'il fut à l'affiche parmi la communauté des sorciers londoniens, il était pourtant tout ce qu'il y a de plus mort. Désorienté, et dénué de ses anciennes relations dans le Londres magique, Matthew Swift n'a maintenant plus qu'une seule idée en tête : se venger de son mystérieux agresseur. Il ne lui reste plus qu'à se mettre d'accord avec les êtres étranges qui ont élus domicile dans son corps...


Il y a près de six mois, Salvek nous faisait découvrir A Madness of Angels, premier roman "adulte" de Kate Griffin. Une petite recherche informait alors que cette dernière avait déjà sévi au rayon jeunesse sous le nom de Catherine Webb.

Les quelques avis trouvés ça et là sur le web anglophone semblaient confirmer un avis globalement très positif, et je m'empressais de dénicher le dit ouvrage dans une des librairies anglophone de la capitale.

Et puis rien. Comme un autre "précieux" objet bien connu des lecteurs de Fantasy, AMoA disparaissait sous une pile, attendant son heure près d'une demie année...

Nul besoin pour vous de patienter aussi longtemps que moi (du moins, si vous êtes anglophones). Parfois comparé (comme beaucoup d'autres) au fameux Neverwhere de Gaiman, AMoA n'a pas à rougir de la comparaison. Pour tout dire, il dépasse même parfois l'oeuvre du maitre...

Laissez moi tout d'abord vous donner une information : Kate Griffin a 23 ans. Et ce qui est très très fort, c'est que ça ne se voit pas. Techniquement, la demoiselle enterre l'essentiel de ses collègues en littérature de l'Imaginaire. Quand au fond, il fait preuve de suffisamment d'épaisseur pour faire de AMoA un page-turner très efficace.

Le principal point fort de ce roman tiens avant tout à son evironnement : Griffin est une Londoner, et parvient a joliment retranscrire l'atmosphère particulière de la capitale britannique (car ce roman parle, avant tout, de Londres). La mythologie Londonienne et son imaginaire collectif sont intégrés à la fois en toile de fond et comme éléments majeurs de l'intrigue.

Le scénario reste somme toute très classique : personnage principal partiellement amnésique; mentor tout puissant passé du côté obscur, dont les lieutenants sont des semi-boss interposés à intervalles réguliers; créature ténébreuse qui poursuit inlassablement sa proie, etc...
Il est malgré tout très accrocheur, et profite de l'enthousiasme et des dialogues witty composés par l'auteur.

Mon bémol, si il y en a un, concernerait la profondeur somme toute limité de ce roman, et de l'aspect un peu trop linéaire du récit. L'histoire est agréable à suivre, et l'ambiance de cette ville imaginaire colle joliment au Londres réel, mais cela s'arrête là. Pas de grands questionnements, et pas de tristesse de quitter cet imaginaire, même si certaines questions sont laissées en suspens (pour une probable suite dans le même univers).

Il s'agit quoi qu'il en soit un très bon roman, d'une auteur particulièrement prometteuse, et je ne peux que le conseiller aux amateurs de fantasy urbaine, ou tout simplement de bons romans.

Ма́стер и Маргари́та

jeudi 30 juillet 2009

Traduction française : Le Maitre et Marguerite


Vous connaissez ces livres dont vous entendez parler depuis des lustres, qui traînent dans la bibliothèque de vos parents puis dans la vôtre, qui sont sensés être des classiques incontournables, mais que vous n’avez toujours pas lus ? Non ? Eh bien tant pis pour vous.

En tout cas, Le Maître et Marguerite est longtemps resté dans cette catégorie pour moi, pour la simple et bonne raison que je n’arrivais pas à me faire une idée de ce que j’allais lire en attaquant ce roman. Il est possible que je ne parvienne pas forcément à clarifier les choses pour vous au travers de cette critique. En tout cas dès que j’ai compris qu’il s’agissait du diable débarquant à Moscou, je me suis empressé d’attaquer cette lecture !

Il est d’abord important de poser quelques éléments de contexte pour mieux comprendre cette œuvre. Mikhaïl Boulgakov est un auteur russe (d’origine Ukrainienne) du début du siècle. Auteur de théâtre et de romans, il a été en conflit permanent avec la censure de la Russie Stalinienne. Il commença à écrire Le Maître et Marguerite en 1928, et mourut en 1940 avant d’en avoir achevé la 4è version. Sa femme termina le roman grâce aux notes de son mari. Une première version censurée (12% du texte en moins) parût au début des années 60, mais la version complète de parût qu’à la fin des années 60. Ce roman est aujourd’hui considéré comme une œuvre majeure du 20è siècle, même si son auteur n’a jamais réellement percé de son vivant. Il est semble évident que Boulgakov a introduit le fantastique et la magie afin de critiquer le système de manière détournée. Il est d’ailleurs intéressant de voir (dans certaines éditions) les passages qui étaient auparavant censurés…leur caractère licencieux n’est pas forcément évident pour un lecteur contemporain…

Le roman est constitué de deux trames parallèles : une se situe dans le Moscou des années 30. Satan s’y manifeste sous l’apparence d’un magicien étranger, Woland, venu en représentation à Moscou, accompagné d’une joyeuse troupe de démons provocateurs. Ce petit groupe décide de semer la pagaille à Moscou, s’attaquant principalement à l’élite littéraire et à la Nomenklatura, mettant chacun face à ses contradictions, sa petitesse d’esprit, ses vilénies. C’est dans cette partie qu’apparaît le personnage du maître, auteur aigri qui a rejeté le monde entier (y compris sa bien-aimée Marguerite) et a terminé dans un hôpital psychiatrique. Plus tard dans cette même trame, on suivra les aventures de Marguerite apprentie sorcière qui accompagne Woland et sa troupe dans une sorte de Bal des Monstres ou Satan est l’hôte.

L’autre trame, racontée à une tierce personne par Woland se situe au 1er siècle à Jérusalem, au moment de la condamnation et de l’exécution de Jésus. Cette partie est centrée sur le personnage de Ponce Pilate, procurateur de Judée et représentant de Rome.

Tout ceci n’est pas très clair ? C’est normal, l’histoire est relativement alambiquée, donc n’allez pas blâmer votre serviteur pour son manque de clarté. Il est très difficile pour moi de donner une opinion d’ensemble sur ce roman, car si je dois citer son principal (et quasi-seul) défaut, c’est son manque de cohérence d’ensemble, de liant. J’y reviendrai plus tard, regardons d’abord les différentes parties du roman :

A mon sens, les péripéties de Woland et de sa troupe constituent l’élément le plus intéressant du livre. La description du Moscou des années 30 est très vivante : les personnages sont hauts en couleur (ou en noirceur), l’hypocrisie de l’intelligentsia de l’époque est très finement abordée. Les acolytes de Woland usent de tours de magie et d’ironie pour acculer des notables engoncés dans leurs certitudes et les mettre face à l’absurdité de leurs comportements. On se régale à chaque dialogue et chaque mauvais tours joué, et le style de Boulgakov, (assez typique des grands auteurs russes - prose primesautière, chaotique, pleine d’ironie) n’enlève rien. Boulgakov met ici tout le monde dos à dos, tout le monde en prend pour son grade, et utiliser la magie rend les choses encore plus distrayantes. La critique implicite de la société est à la fois fine et amusante, et le fait de donner un rôle attachant à Satan et à ses démons permet de flouter les notions de bien et de mal. Bref, durant toute cette partie du livre, qui est la plus longue, on se marre vraiment tout en apprenant…de la vraie culture pour tous…

La partie concernant Ponce Pilate est clairement se déroule sur un rythme plus lent et plus dramatique, mais reste très intéressante. Elle montre la souffrance intérieure de Pilate du fait de sa fascination pour Jésus, qu’il est obligé de condamner. J’ai été plus intéressé par la profondeur des tribulations de Pilate que par la réflexion sous-jacente sur la morale que je vous laisserai interpréter par vous-mêmes si vous lisez le livre. En effet, je suis toujours impressionné quand des écrivains arrivent à mettre en scène des personnages historiques célèbres, les humanisent tout en conservant leur dimension mythique. Les références et symboles sont nombreux, mais je crains que la plupart ne m’aient échappé…certains disent même que Pilate est une référence à Staline…

L’histoire du Maître et de Marguerite me laisse plus perplexe. S’il est vrai que les personnage ont une certaine épaisseur, on a du mal à s’attacher réellement à leur histoire, sachant qu’il sont censés être le liant du roman. L’amour du Maître et de Marguerite est beau, réaliste, immuable, vécu à la fois comme un miracle et une malédiction, mais on se demande parfois ce qu’il vient faire la. Les scènes où Marguerite joue à la sorcière sont merveilleusement bien écrites et certains auteurs de Fantasy pourraient en prendre de la graine. Mais la manière dont tout cela s’articule n’est pas claire. Les diverses analyses faites sur ce roman voient plus une cohérence sur le fond (une remise en question des notions de bien et de mal) que sur l’histoire, mais je trouve que cela n’est pas suffisant.

Loin de moi l’idée de vous décourager de lire ce roman, au contraire, je tenais seulement à vous prévenir car il est relativement surprenant dans sa structure. Au final il s’agit d’un livre très intéressant (que ce soit sur les considérations morales ou sur la critique de l’époque), extrêmement bien écrit, très souvent drôle, et où la magie sert la satyre politique et sociale à merveille. C’est un livre qu’il faut avoir lu, ne serait-ce que parce qu’il n’en existe aucun autre de semblable, et pour pouvoir se faire une opinion…

Juste pour vous tenter un peu plus, de nombreux écrivains et musiciens se sont inspirés de ce roman : les Rolling Stones dans Sympathy for the Devil, Rushdie dans les Versets Sataniques, Franz Ferdinand dans Love & Destroy, et j’en oublie…

Auteur de cette chronique : Michael

Imajica, de Clive Barker

dimanche 21 juin 2009





Pour discuter d'Imajica et écrire une chronique en bonne et due forme, Pluthero Quexos serait certainement meilleur que moi. Après tout, il est l'un des plus célèbres dramaturges du Deuxième Empire. Mais il n'est qu'une ombre, un figurant à l'arrière de la scène, un nom exotique jeté au début de ce billet pour attirer votre attention. Laissons-le à son art et plongeons au cœur du spectacle.

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Charlie Estabrook a l'âme en peine. Judith l'a quitté, le blessant dans son orgueil. Un seul baume apaisera sa douleur : la mort de son ex. Le meurtre n'étant pas sa tasse de thé, Charlie fait appel à l'inquiétant Pie'oh'pah, assassin et prostitué. Celui-ci échoue dans sa basse besogne. La faute à Gentle, l'ancien rival de Charlie, le précédent amant de Judith.

Le plus étrange, c'est que Pie'oh'pah connaît Gentle. Pourtant celui-ci ne semble pas le reconnaître. Pie abandonne alors sa tâche et entraine Gentle à travers l'In Ovo, le vide entre les mondes, puis dans les Quatre Empires Réconciliés, territoires infinis aux multiples merveilles et horreurs où Gentle sera confronté à son passé oublié.

Tandis que Gentle parcourt l'Imajica, Judith devient la maîtresse d'Oscar Godolphin, membre d'une société secrète, la Tabula Rasa, dont le but est d'empêcher par tous les moyens la "réconciliation" de la Terre avec les autres Empires.

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Imajica est un roman (malgré ses deux épais volumes, il s'agit bel et bien d'un seul roman, déjà coupé pour la version originale) à la croisée des genres. Il commence comme un thriller fantastique avant de basculer dans la fantasy. Clive Barker poursuit la voie tracée avec Le royaume des devins et qu'Abarat, sa tétralogie pour la jeunesse, prolonge aujourd'hui. Il mêle le merveilleux à l'horreur et donne à la fantasy urbaine un de ses livres les plus sombres.

Avec l'Imajica, Clive Barker prend l'univers pour scène et la remplit de personnages fouillés et pittoresques. Nous sommes loin des nouvelles intimistes des livres de sang. Imajica est un voyage en pays inconnu, un roman épique pour un périple à nul autre pareil (comme d'habitude avec Barker, l'érotisme pas vraiment soft n'est jamais loin, évitez d'offrir Imajica à votre petit neveu à moins de vouloir l'initier à la sexualité inter-espèce).

Imajica est paru à une époque où les sites et blogs littéraires ne fleurissaient pas aussi facilement qu'aujourd"hui. Il est donc rarement chroniqué et c'est réellement dommage. Imajica est un chef-d'œuvre méconnu épuisé chez ses différents éditeurs francophones (respectivement Rivages, Pocket et Fleuve noir, l'édition Rivages est à éviter, il manque une très intéressante préface de l'auteur). On ne peut qu'espérer une réédition, pourquoi pas en seul volume, comme ce fut le cas outre-Manche. Si vous ne lisez pas en anglais, vous le trouverez donc difficilement mais si vous réussissez, vous vous embarquerez dans un voyage étrange et fascinant.

Concluons par une curiosité. Pour les collectionneurs patentés, le livre a donné naissance à un jeu de cartes. En anglais, bien entendu.

Auteur de cette chronique : Christopher

Un groupe de lecture sur l'Imaginaire

jeudi 11 juin 2009
Il s'appelle Le Cercle d'Atuan, c'est en français, et c'est disponible à cette adresse : http://lecercle.atuan.org/





Malgré sa présentation assez classique, il ne s'agit pas d'un forum de discussion habituel. Le but premier est de constituer un groupe de lecture sur des oeuvres précises, que nous lirons ensemble, simultanément, par roulements d'un mois. Je vous enjoins à y faire un tour, et de lire les quelques sujets déjà crées pour plus de précision sur son fonctionnement.

C'est un projet un peu expérimental, et il est clair que son succès dépendra à 95% de votre participation, mes très chers lecteurs.

Vous y trouverez toute la vérité sur Twilight, La Grippe A, Harry Potter, Airbus, le transfert de Cristiano Ronaldo, Hadopi et le nouvel Iphone. (Ca, c'est pour améliorer le référencement Google de ce post).

* * *

La prochaine chronique sur ce blog (certainement ce week-end) concernera Drood, de Dan Simmons, ou Axiomatique, de Greg Egan.

Le débat du samedi

samedi 6 juin 2009


(Non, ça ne va pas devenir une habitude, malgré le subtil titre de ce post.)

Je faisais un petit tour il y a quelques jours, sur un de mes forums francophones préférés, et j'ai été assez intéressé d'y voir le contenu d'un débat intitulé "Les blogs de lecture et vous?", qui posaient la question de la (non-)fréquentation des blogs de lecture par les membres du dit forum.

Je pense qu'il pourrait être intéressant d'inverser la question, et de demander aux lecteurs de blog et/ou bloggeurs, ce qu'ils pensent des forums d'Imaginaire à l'heure actuelle.

Je fréquente moi-même régulièrement les blogs ET les forums, autant francophones qu'anglophones, mais il me semble que ce n'est pas forcément un cas général. Des gens comme Salvek, Arutha, Isil, Livrement (...) ont l'air de surtout s'intéresser aux blogs, moins aux forums (ou pas les mêmes que moi), alors que d'autres comme Outremer, Lisbeï, L (...) ne me semblent pas très présents sur la blogosphère, alors qu'ils participent régulièrement sur au moins un forum de ma connaissance.

La question du jour est donc (tada !) :

Why ?!?! Quels sont vos critères de choix pour participer à un forum ou à un blog ? Quels sont vos forums ou communautés blogguesques préférées ? Qu'est-ce qui vous manque dans le web Imaginaire tel qu'il est aujourd'hui ? Quelles sont les bonnes adresses que vous souhaitez partager ? Ensemble, changeons le monde pour les générations futures ! Dites moi TOUT !

The Good Fairies of New York, de Martin Millar

samedi 30 mai 2009

Traduction française : Les petites fées de New York

The Good Fairies of New York, ou comment deux fées écossaises, kleptomanes, poivrotes et têtes brulées, se retrouvent propulsées au milieu d'un New York infesté de créatures étranges (et surtout, d'humains !). Avec un choc des cultures, et une quasi guerre-civile à la clé.

Il y a longtemps que je n'avais pas lu de fantasy urbaine de bonne qualité. Bien trop souvent, ce genre prends exemple sur son pendant médiéval, et nous offre une soupe fade, cent fois réchauffée. Point de tout cela dans ce roman, ou l'opposition entre le côté fantastique entièrement assumé d'un côté (les fairies et leurs artefacts), et un côté plus pragmatique de l'autre (ex : les "préoccupations" de Dennis, et la maladie de Kerry), traités sur un ton humoristique, voire parodique, donne un mélange rafraichissant qui aurait bien pu être issue de la plume d'un duo Gaiman / Pratchett après un verre de trop. Pas la pire des comparaisons.

Les chapitres nombreux et très courts associés à une narration nerveuse, sont un argument de plus qui donne envie de tourner les pages frénétiquement. Si je devais regretter une chose concernant cette approche, ce serait les transitions entre les scènes, qui ne sont souvent pas marquées par un chapitre, ni même un saut de ligne. On ne se rends pas toujours compte immédiatement que l'on est passé d'un groupe de personnage à un autre, d'une scène à la suivante.

En partie pour ça, et aussi du fait du grand nombre d'évènements qui s'enchaînent en un temps (et un nombre de pages) assez réduit, c'est un livre qui gagne à mon avis à être lu rapidement. Laissez-le trainer quelques jours, et pas sûr que vous puissiez facilement vous remémorer tous les détails de l'intrigue (surtout si, comme nos deux héroïnes Heather et Morag, vous avez un penchant pour la boisson).

Car comme cela semble être une habitude chez Millar (voir la chronique de Lonely Werewolf Girl), il n'y a pas vraiment ici une intrigue, mais des intrigues, composées de fils et de personnages qui s'entremêlent et se rencontrent. Cela donne au roman une ambiance très vivante, mais peut perdre un peu le lecteur pas suffisamment attentif.

D'autant que l'auteur favorise l'action et les dialogues plutôt que les descriptions, qu'elles soient de lieux ou de personnages. Ces derniers sont d'avantage définis par ce qu'ils font, que par ce qu'ils sont.

C'est quoi qu'il en soit un point de vue peu commun sur la nature des fairies, et si comme moi, vous connaissez peu de fantasy urbaine de qualité, il est difficile de laisser passer The Good Fairies of New York.

Lonely Werewolf Girl, de Martin Millar

dimanche 24 mai 2009

Pas de traduction française.

Comme son titre le suggère astucieusement, Lonely Werewolf Girl est une histoire de loups-garous. Mais il ne s'agit ni des monstres sanguinaires qui se sont perpétués depuis les légendes traditionnelles jusqu'à Buffy the Vampire Slayer, ni des nobles lycanthropes en harmonie avec la nature sauvage à la sauce White Wolf, ni d'un mélange des deux tendances. Les loups-garous de ce roman de Martin Millar (où ils constituent la majorité des personnages) sont avant tout des individus. Leur nature inhumaine fait bien entendu partie de ce qu'ils sont, mais elle est très fréquemment éclipsée par des éléments de leur personnalité et des manières de s'adapter au monde moderne qui sont au contraire très humains.


La "lonely werewolf girl" s'appelle Kalix. C'est l'archétype de l'adolescente perturbée : impulsive, asociale, angoissée, violente, à peu près illettrée, anorexique sous forme humaine et boulimique sous forme lycanthrope, elle se taillade régulièrement la chair, dort n'importe où, ne se lave pas, se drogue au laudanum et est obsédée par le souvenir du petit ami avec lequel elle a couché à l'âge de quatorze ans. Kalix est aussi la fille du chef de clan des loups-garous d'Écosse. Elle hait son père et l'a grièvement blessé au cours d'une dispute, ce qui a fait d'elle une fugitive pourchassée.


Kalix est ce qui se rapproche le plus d'un personnage central, mais il serait très exagéré de dire que l'histoire tourne essentiellement autour d'elle. Il y a en tout une bonne douzaine de personnages qui pourraient être qualifiés de principaux et qui ont chacun leurs désirs, leurs projets et leurs relations avec les autres : Daniel et Moonglow, deux humains qui rencontrent la jeune loup-garou par hasard ; Sarapen et Markus, les deux frères de Kalix, qui vont se disputer sauvagement la succession de leur père ; Thrix l'Enchanteresse, soeur de Kalix, qui souhaiterait que toute sa famille la laisse exercer son métier de styliste en paix ; la Reine du Feu Malveria, principale cliente de la précédente, qui désire une garde-robe à faire blêmir de jalousie les autres souveraines de dimensions surnaturelles ; Verasa, mère de Kalix, qui est prête à tout pour que ce soit son fils Markus qui devienne chef de clan ; et encore bien d'autres.


De même, le scénario n'est pas centré autour d'un axe unique et clairement défini : il se compose de nombreux fils, qui se croisent et se mélangent constamment. Martin Millar les orchestre avec beaucoup d'adresse et les pimente de nombreuses surprises. Le roman est divisé en pas moins de 236 chapitres - aucun d'eux ne faisant plus de quelques pages - et bondit avec aisance d'un élément de l'histoire à un autre. Le rythme est vif, le style laconique et il n'y a vraiment aucun moment où on puisse juger que les choses traînent en longueur. Il y a de fréquentes touches d'humour dans l'histoire, ce qui ne l'empêche pas d'être sérieuse et parfois sombre.


Lonely Werewolf Girl est un roman inhabituel par son refus de l'unité classique, une lecture très plaisante grâce à sa fraîcheur et sa vivacité et une histoire intéressante par son originalité et ses personnages très bien développés. Il n'est pas traduit actuellement mais le sera peut-être à l'avenir : la version française d'une oeuvre précédente de Martin Millar, The Good Fairies of New York, vient tout juste de paraître, dix-sept ans après sa publication d'origine.

Auteur de cette chronique : Outremer

Mini-dossier Martin Millar


Martin Millar est un auteur écossais vivant à Londres, assez peu connu de par chez nous, mais qui a notamment remporté le World Fantasy Award 2000 pour le premier volume de sa série Thraxas (sous le nom Martin Scott).

Les prochains posts seront consacrés à deux de ses oeuvres, que l'on pourrait rattacher au sous genre de la fantasy urbaine.

Le premier, sur Lonely Werewolf Girl, sera l'oeuvre de mon estimé collègue Outremer, qui sévit entre autres sur Le Coin des Lecteurs.

Le second, sur The Good Fairies of New York (VF : Les petites fées de New York) sera écrit par votre serviteur.

Pour en savoir plus sur cet auteur, vous pouvez consulter son blog à http://martin-millar.blogspot.com/

Teatro Grottesco, de Thomas Ligotti

samedi 9 mai 2009

Pas de traduction française.


Thomas Ligotti est un auteur américain assez peu connu, sévissant dans un genre que l'on pourrait qualifier d'horreur psychologique. Malgré sa popularité très relative, Ligotti a un statut assez particulier, étant considéré comme un génie et un auteur culte par beaucoup de ceux qui se sont risqués à lire quelques unes de ses nouvelles horrifiques.

Le (très) court recueil In a Foreign Town, In a Foreign Land que j'avais lu par hasard il y a quelques mois, m'avait suffisamment intrigué pour que je décide d'acheter un de ses derniers recueils : Teattro Grottesco.

Si H.P. Lovecraft peut être considéré comme un descendant spirituel d'Edgar Allan Poe, Thomas Ligotti peut tout aussi bien être décrit comme le successeur moderne de Lovecraft. Les deux hommes sont adeptes d'une horreur suggérée basée sur une ambiance pesante, des personnages extrêmement négatifs, une vision de l'humanité tout à fait nihiliste, et des jeux de langages à répétition.

Sur tous ces points, Teatro Grottesco semble s'inscrire au coeur de l'oeuvre de son auteur : on ne compte plus les descriptions de villes fantômes perdues loin de toute civilisation, des personnages souffrant de dégradation physique ou intellectuelle, et de portraits peu ragoutants des populations locales (qui ne sont bien évidemment que des métaphores pour l'humanité en général).

Si il y a un point que j'ai particulièrement aimé dans ce recueil, c'est que chaque nouvelle à sa propre identité. Nous ne sommes pas dans un recueil de Lovecraft, ou seuls une poignée de textes sont dignes d'intérêts, les autres n'étant que des variations et régurgitations des mêmes thèmes. Je soulignerai aussi que les textes de Ligotti sont en moyenne plus courts, moins sujets aux répétitions excessives, et digressent moins que ceux de son illustre ainé.

Ce qui manque peut-être à ce recueil de bonne qualité, c'est un texte vraiment au dessus du lot. Car si les nouvelles ici présentes sont presque toutes bonnes, j'aurais espéré encore mieux. Dans l'état, c'est un recueil qui plaira certainement à la plupart des lecteurs habituels de ce genre si particulier, mais qui ne suffira pas forcément à convaincre les réfractaires.